Artistes

Eve Tagny

Eve Tagny (née et vit à Tiohtià:ke / Mooniyang / Montréal, Canada) s’intéresse à la nature, particulièrement aux cycles, aux rythmes, aux formes et aux matériaux qui la modulent. Conjuguant performance, vidéo et installation, sa pratique se déploie principalement autour de la figure du jardin, que l’artiste considère comme un espace à la fois naturel et théâtral ancré dans des dynamiques de pouvoir et des histoires coloniales. Les œuvres qui en découlent, irriguées par des recherches méticuleuses, abordent le colonialisme, la souveraineté corporelle, le labeur et le désir, afin de déboulonner l’hégémonie du récit occidental à l’égard de la notion de nature. Le geste occupe un rôle central dans sa démarche, où il active des rituels de commémoration, d’interprétation ou de transmission capables de mettre en tension les histoires et les savoir-faire dans lesquels sont enracinées nos conceptions de la nature.

Né.e
Tiohtià:ke / Mooniyang / Montréal, Canada
Pays / Nations
Canada
Vit
Tiohtià:ke / Mooniyang / Montréal, Canada
Site Web
evetagny.com

Œuvres

De la terre

Avec l’installation multimédia English Rose, Tagny se penche sur la culture de la rose, fleur très prisée qui est au cœur d’une vaste industrie mondiale. Emblème de l’Angleterre – la rose Tudor, depuis le règne d’Henri VII (1485-1509) –, la rose incarne l’idée de pouvoir, mais aussi celle d’hybridité. English Rose porte notre regard sur cette fleur polysémique dans une installation architecturale reprenant le dispositif du jardin botanique, où convergent et dialoguent des vidéos, des photographies et des formes organiques. L’une des vidéos s’intéresse notamment aux manières dont sont mis au service de projets horticoles les corps, que l’artiste s’attache à repositionner, avec le geste, au centre d’une relation à la nature par l’entremise de la performance et de l’archive. À travers ces mouvements, elle interroge les conditions parfois difficiles du travail agricole, où le corps devient machine – conditions qui permettent la rosiculture intensive, grâce à laquelle sont employées des millions de personnes dans le monde. Cultivées en grande partie en Équateur ou au Kenya, les roses qui se retrouvent sur les marchés européen et nord-américain deviennent symboles de migration, le chemin parcouru par la fleur faisant écho aux corps déplacés. Retraçant les rapports de domestication de la nature comme autant de couches sédimentées dans un jardin, English Rose se penche sur les façons dont les structures coloniales se manifestent aujourd’hui. L’œuvre met en lumière les récits et les savoirs ensevelis, attirant l’attention sur les effets écologiques néfastes de l’industrie florale tout comme sur la spiritualité et l’engagement liés au soin que l’on porte à une fleur.